Lutte contre les pénuries de médicaments : nouvelle proposition de loi

Ecrit par

Caroline Arrighi-Savoie

Senior Associate
France

Collaboratrice senior au sein du groupe commercial, je suis plus particulièrement en charge des questions relatives à la santé et aux sciences de la vie.

johanna harelimana Module
Johanna Harelimana

Associate
France

Avocate au sein de l'équipe « Sciences de la Vie », je conseille nos clients français et internationaux sur des questions réglementaires principalement dans les secteurs de la santé, de l'alimentation et boisson et de l'environnement.

Nour Saab

Juriste
France

Je travaille en tant que juriste au sein de l'équipe 'Sciences de la vie' de Paris que j'ai rejoint en janvier 2022.

Quelques semaines seulement après la publication de la loi de financement pour la sécurité sociale pour 2024, une proposition de loi visant à lutter contre les pénuries de médicaments a été déposée à l’Assemblée nationale le 16 janvier 2024 (la « Proposition de loi »).

Le constat dressé par les députés à l’origine de la Proposition de loi est le suivant : malgré les mesures adoptées pour essayer d’endiguer les phénomènes de pénuries de médicaments, celles-ci persistent, et se sont même fortement aggravées ces dernières années (avec une augmentation de plus de 300 % en six ans). Face à cette situation alarmante, les députés indiquent que : « l’État doit reprendre la main sur la politique d’approvisionnement en médicaments en France, notamment en donnant toute leur effectivité aux obligations qui incombent aux industriels. » 

Actuellement, les laboratoires pharmaceutiques ont l’obligation de constituer un stock de sécurité minimal, qui ne peut excéder quatre mois de couverture des besoins en médicaments. Ces durées varient en fonction de la catégorie du médicament (cf. décret n° 2021-349 du 30 mars 2021) :

  • deux mois minimum pour les médicaments d’intérêt thérapeutique majeur (MITM) (durée pouvant être portée à quatre mois pour ceux faisant l’objet de ruptures ou de risques de ruptures de stock réguliers dans les deux années précédentes) ;
  • un mois pour les médicaments ne relevant pas de la catégorie des MITM mais contribuant à une politique de santé publique ;
  • une semaine pour les autres médicaments ne relevant pas de la catégorie des MITM.

La limite maximale de quatre mois prévue par la loi ne suffirait pas à assurer un approvisionnement adéquat en médicaments essentiels sur le territoire français. 

Dans ce contexte, la Proposition de loi vise à renforcer les exigences relatives à la constitution de stocks de sécurité minimaux pour les industriels, et propose les modifications suivantes :

  • intégrer dans la loi une obligation de maintenir un niveau minimal de stock de sécurité, avec une période de quatre mois pour les MITM et de deux mois pour les autres médicaments, ce qui représente une augmentation de deux fois par rapport aux exigences actuelles ;
  • augmenter la limite maximale du stock de sécurité pouvant être exigée des industriels. Ce stock de sécurité maximum serait de huit mois pour les MITM et de six mois pour les autres médicaments, par opposition à la limite actuelle de quatre mois, quelle que soit la nature du médicament.

Par ailleurs, l'article 2 de la Proposition de loi vise à renforcer les sanctions financières imposées par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) en cas de non-respect de ces obligations. Actuellement, les sanctions sont jugées insuffisantes, avec des montants plafonnés à 30 % du chiffre d'affaires réalisé lors du dernier exercice clos, dans la limite d'un million d'euros (sanction pouvant être assortie d'une astreinte journalière). Il est proposé de porter ces sanctions à 50 % du chiffre d'affaires réalisé sur le médicament concerné, avec un maximum de 5 millions d'euros.

Il ressort de ce qui précède que la Proposition de loi (qui doit encore être discutée et votée) renforce encore une fois la responsabilité des entreprises pharmaceutiques dans un contexte économique très difficile. Cependant, il serait utile de rappeler à nos députés que les mesures de lutte contre les pénuries ne devraient pas nécessairement peser que sur les entreprises. En l’occurrence, d’autres mesures pourraient être envisagées, comme la révision des politiques publiques de prix.

 

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